Le vinyle, oui, mais pas à n'importe quel prix !

Si le pouvoir d’attraction du vinyle est toujours intact et surtout incomparable par rapport aux autres supports, il convient néanmoins de souligner l’inquiétante évolution de ce marché devenu de plus en plus porteur, au point que si sa croissance n’est pas encadrée, il va très vite être réservé à une élite possédant une large surface financière, ce qui vous avouerez bien volontiers, est contraire à sa vocation première. Mais essayons de reprendre dans l’ordre les étapes de cette évolution.

Donné comme mort dans les années 80/90, il a retrouvé une nouvelle jeunesse à l’aube de ce nouveau siècle, du fait du retour de la mode vintage. Petit à petit, le nombre de magasins, tenus par des indépendants, s’est accru de manière considérable, ce qui pouvait laisser croire au consommateur de pouvoir faire jouer aisément la concurrence. Malheureusement, les faits ont prouvé le contraire, puisque devenu objet de mode, le prix d’un disque vinyle d’occasion, en relatif bon état, s’est mis à grimper en flèche pour atteindre aujourd’hui, de manière quasi-systématique, les 10/20€, que ce soit en boutique ou bien dans les divers salons. Ce qui implique un solide budget mensuel pour les collectionneurs, que certains d’entre nous sont.

Le marché du neuf a lui aussi suivi cette courbe, puisque les rééditions de notre musique préférée se sont multipliées ces dernières années nous permettant ainsi de pouvoir retrouver de manière inespérée des albums que nous croyons définitivement perdus au rayon des souvenirs. Mais là encore, les plateformes type Amazon et Fnac, principaux acteurs du marché en France, ont très vite compris les bénéfices substantiels pouvant être tirés de ce nouvel essor. Pour s’en convaincre, il vous suffit d’aller vous promener dans les rayons de la Fnac de votre ville. Derrière quelques produits d’appels, type Santana « Abraxas » ou Lou Reed » Berlin », vendus selon les périodes entre 10 et 15€, la plupart des autres albums oscillent avec un prix moyen de vente entre 30 et 45€, comme par exemple, les disques des Allman Brothers Band ou bien encore, pour les collectionneurs, ceux de Booker T ou la série des Aynsley Dunbar « Retaliation ». Pour effectuer une comparaison avec le prix de vente à l’époque de leur sortie, cela revient, si l’on prend un tarif moyen de 38€, à payer un vinyle 249 francs, ce qui vous en conviendrez surement avec moi est proprement sidérant pour une simple réédition.

A ce rythme-là, la poule aux œufs d’or risque de disparaitre rapidement. Attention à ce que le marché du vinyle ne devienne pas, toute comparaison gardée, comme une de ces bulles immobilières montant à une vitesse vertigineuse avant d’exploser avec les conséquences connues de tout le monde. Chacun de nous y perdrait.

 Nous pouvons d’ailleurs aisément établir un parallèle avec un autre phénomène constaté ces dernières années, à savoir l’inflation du prix des billets de concerts, qui atteint des sommets en 2019 (Elton John, Eagles etc…). Seul avantage de ce dernier point, nous pourrons faire des économies cet automne et cet hiver, la bonne musique ayant décidée de se mettre en grève de concerts, puisque, à ce jour, pour la première fois depuis fort longtemps et en attendant l’officialisation des concerts de Walter Trout en mai 2020, il n’y a pratiquement rien d’intéressant à l’affiche que ce soit en province (sauf Ponty, Mayall et Magma) ou même sur Paris, à l’image de la triste programmation du New Morning, tout le long de cette année 2019, exception faîte de John Scofield et Mike Stern programmés sur novembre et de Herbie Hancock à Pleyel le 14 du même mois, mais, hélas vus tellement de fois qu’un déplacement ne serait en aucun cas justifié.

                                                                                                               Frédéric.