TEDESCHI TRUCKS BAND: "Live from the Fox Oakland": L'album de la maturité !

28 mars 2017

Voici certainement un des groupes les plus intéressants des dernières années qui bien que n’appartenant pas à la génération 60/70, objet de ce blog, a toute sa place ici du fait de son évolution musicale, de son esprit d’ouverture et de la montée en puissance des nombreux musiciens qui le compose. Si d’ailleurs une machine à remonter le temps existait, il serait intéressant de régler son curseur sur le milieu de la décennie 70 tant Tedeschi Trucks Band, puisque c’est d’eux qu’il s’agit, aurait sa place au milieu des locomotives de l’époque telles que Weather Report pour ne citer qu’eux. Certes ce que nous propose Le couple Trucks et ses musiciens diffère totalement de la musique de Joe Zawinul et Wayne Shorter (quoiqu’après réflexion la question pourrait se poser à certains moments), mais il y a en commun entre les deux formations ce désir incroyable d’innover et surtout de personnaliser et d’apporter son désir d’innovation au blues, au jazz et à la country pour TTB.

Quelle évolution incroyable entre les deux albums live pourtant guère éloignés dans leur parution ! S’il est difficile de prévoir qu’elle sera la suite de la carrière de ce groupe, il y aura, dans tous les cas, un avant et un après « Live from the Fox Theater » tant cet album constitue un véritable tournant dans la musique du groupe. La maturité et la complémentarité dont celui-ci fait preuve va littéralement bluffer l’auditeur qui comparera les deux productions. Qu’il est agréable de dresser le constat qu’une nouvelle génération de brillants musiciens soit capable de produire des albums de cette dimension. Considérablement étoffé, le groupe du couple Trucks, désormais composé de deux batteurs, de trois choristes capables de prendre les solos, et d’une redoutable et très efficace section de cuivres, a fait considérablement évolué son répertoire sur ce magnifique album associant son propre répertoire à des reprises d’artistes au style aussi éloignés que Eric Clapton, Leonard Cohen, Bob Dylan, Carlos Santana et même Miles Davis. Au-delà de simples reprises, il s’agit là de morceaux totalement renouvelés avec une forte touche personnelle. Mais la principale évolution, qui va peut- être surprendre et aussi un peu déconcerter le public de la première heure, c’est cette incroyable tonalité Jazz, voir free Jazz avec une touche de musique indienne qui est la caractéristique du deuxième CD. Incontestablement Derek Trucks est en train d’acquérir avec cet album une nouvelle dimension qui lui permet de dépasser le stade du brillant soliste qu’il était. Ses improvisations toujours réussies au sein d’une formation aussi aguerrie ne sont pas sans rappeler le Carlos Santana aérien de « Borboletta ». Quand à Susan, sa femme, non seulement elle nous démontre tout son talent de guitariste sur certains solos, mais surtout sa voix va vous saisir d’émotions en particulier sur le « Bird on the wire » de Leonard Cohen qu’elle déchire littéralement. A ce sujet, et c’est d’ailleurs, la seule réserve que l’amateur de country blues émettra envers ce superbe album, ses apparitions vocales sont bien trop rares et à ce titre, nous ne pouvons que souhaiter la reprise de ses productions solos ou sa voix si particulière donnait au blues toute l’émotion que seule cette musique sait produire.

Le coffret se compose de deux CD et aussi d’un DVD retraçant les meilleurs moments du concert avec quelques à côté, mais surtout l’interprétation par Susan Tedeschi en solo de la superbe chanson « Color of the blues » qu’elle reprend avec John Prine sur le dernier album de duos de celui- ci dont vous avez pu trouver la chronique sur ce blog.

Il est regrettable que la tournée Européenne de Tedeschi Trucks Band de cet fin d’hiver ne passe pas par la France, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, mais ceci est un autre et éternel débat. Souhaitons que 2018 soit l’année de leur retour dans notre pays. Les groupes de cette dimension se comptent sur les doigts d’une main. Nul ne doute que l’accueil qui leur sera réservé sera digne de leurs talents.

Frédéric.